Issue du Conservatoire d'Art Dramatique d'Orléans, j'ai pu découvrir un travail sur le corps, le mime, et l'improvisation sous la direction de Jean-Claude Cotillard, mettre le "plus petit masque du monde mais aussi le plus dur à porter", danser sur les pas de la Commedia dell'arte sous la direction d'Amédée Bricolo. Enfin, j'ai croisé le chemin de Niseema Theillaud sur lequel j'ai voulu m'attarder plus longuement, celui du conte. Et c'est là que j'ai fait vivre l'âme du conteur à travers le corps du comédien.
"Conte du monde", nous a-t-elle dit et aussitôt une fissure de mon enfance autrefois douloureuse s'est ouverte sur le vent ramenant des rifs des poussières salées sur le visage des bergers enfants blondissant de joie, sur les champs arides de maïs, martelés par les sabots d'ânes en partance vers les puits où quelques sonates d'odeurs de figues et de laurier se sont mises à orchestrer mes souvenirs, à me libérer de ma culture d'origine que j'avais oubliée : la petite fille marocaine se remettait en paix avec ses terres maghrébines.
Mes sens s'étaient mis en éveil et la conteuse que je devenais se nourrissait de sons arabes, des différents visages au caractère prononcé de mes tantes, de mes grands-mères, de la sagesse bedonnante de mon grand-père Bo Bouazza.
Grâce à ce regard d'enfant retrouvé, j'ai reposé mes yeux sur ses temps de familles, d'accidents, d'anecdotes tantôt sarcastiques tantôt burlesques, sur ses temps de jalousie, de disputes, de malentendus. Certains souvenirs au goût d'amertumes, enrobés parfois de violence me sont alors apparus comme universels à toute famille quelque soit leur langue, leur culture, leurs origines. J'ai vu toute la palette de l'humanité dans chaque membre de ma famille, du nourrisson à la victime en passant par l'être sage.
J'ai reparlé une langue que j'avais cru ne jamais savoir : l'arabe et dans cette langue, j'ai mélangé des herbes de théâtre, de clown, de conte, de chant et le premier conte "La famille Raabi Wolf" est né.
Aujourd'hui j’interprète des contes en arabe, en français des contes juifs, des contes soufis, des contes de Côte-d'Ivoire devants petits (à partir de l'âge de 5 ans) comme devant les grands. Pour dépasser la barrière de la langue, les gestuelles marquent les expressions, prononcent les caractères tout en respectant la justesse des dires et des personnages. Qui plus est, la langue arabe a souvent des mots français typiques du dialecte (scandale, cinééma, exguzé-moi,...).
Le spectacle s’accompagne de lumières chaudes orchestrées par Jean-Marc Poullet, avec tout un thème autour du jour et de la nuit et des accessoires de taille.Il ne reste plus qu'une chose à dire : Faites la paix avec votre propre culture et la guerre s'évaporera dans toutes les autres.
Notice générale avant la prescription de ces contes …
Si vous êtes venus chercher la position statique et traditionnelle du conteur, ne les prenez pas car vous risqueriez d’avoir des vertiges face à la bougeotte inconditionnelle de la comédienne Ilham Bakal. Le rythme magrébin et africain dépasse la stature et se transmet par jeu visuel, par jeu de corps et de mains, par des accents magrébins, africains. Tantôt Ilham se pose en conteuse et tantôt rentre dans les diverses personnages de ses contes en tant que comédienne. Elle pleure pour eux ( mais aussi pour vous), elle se moque pour eux mais aussi pour vous, elle rit avec eux comme elle rit avec vous. Ce spectacle est riche en interactivité, qui se joue des codes théâtrales et de conte pour mieux garder ce fil invisible qui s’instaure entre le public et la comédienne. A vous de voir…
La famille Raabi Wolf
Conte d'Ilham Bakal, en arabe inspiré des Récits Hassidiques, de Martin Buber
Une voisine de la famille Raabi Wolf arrive sur son âne, épuisée par l'entêtement de ce dernier, elle décide alors de se poser pour raconter la violente dispute entre la maîtresse de maison et la gentille domestique Zenya.
L'arabe laisse alors sortir des cris portés dans les aigus et des petits moments de folie passagère qui enveloppent les spectateurs dans l'innocente cruauté très vite tirée dans le burlesque.
(NB : conte en arabe introduisant des mots en français qui appartiennent en réalité au dialecte arabe : pareil à l'anglicisme en français).
Akosso la chenille
Contes de Manféï Obin, éditions les conteurs, en français, adaptation d’Ilham Bakal
La famine est tombée dans le village des animaux. Il est grand temps de réagir, alors tous les animaux se rassemblent dans un grand élan de solidarité pour travailler tous ensemble dans les champs des uns puis dans le champ des autres.
Après les travaux, chaque soir un festin se prépare mais toujours d'une curieuse manière où se mêlent au plat de drôles d'aventures, des chants akyé et des rythmes des percussions qui font agiter toute la communauté des spectateurs.
L'intelligence ou Rabiya et son aiguille
Conte soufi d'Osho Rajneesh, extrait de Tarot de Rajneesh, éditions le Voyage Intérieur, conte en arabe traduit en français, adaptation d'Ilham Bakal
Du fond de ces rues d'El Jadida, Rabiya cherche son aiguille tout le long du jour et les voisins s'agitent, se précipitent, ruminent sans jamais la trouver mais la nuit tombée, tout s'éclaircit...
La lourde tâche du petit Abdellah
Conte soufi d'Osho Rajneesh, extrait de Tarot de Rajneesh, éditions le Voyage Intérieur, conte inspiré et réécrit , adaptation d'Ilham Bakal
Abellah est un grand serviteur de Sidi Mohamed mais surtout quand il a envie. Des fois oui des fois non, jusqu’à la nuit où Mohamed lui demande de s’occuper de son chameau …
L’Est Bala et L’Ouest Bala
Conte Burkinabe de Dramane Koita, extrait de Toun’gan, adaptation d’Ilham Bakal
L’Est Bala est le plus grand trompeur de l’Est et l’Ouest Bala est le plus grand trompeur de l’Ouest.
Quand ils se rencontrent l’Est Bala et L’Ouest Bala, c’est pour mieux se tromper. C’est à qui trompera l’autre toujours mieux, toujours plus loin, toujours plus haut jusqu’à ce que la leçon tombe sur la tête de nos deux fameux trompeurs…
Spectacle tout public à partir de 5 ans à autant que vous voulez !
Les petits gigotent au rythme des sons arabes, des djumbés et autres percussions, les plus grands ouvrent grands leurs yeux et leurs oreilles, chacun est prêt à répondre aux questions posées mais tous s'accordent le rire et un délicieux moment de surprise.