Située dans le Nord du Maroc, sur les premiers contreforts de la chaîne montagneuse du Rif, la petite ville de Chefchaouen est le centre d’une tradition musicale et poétique riche et diversifiée. L’une de ses expressions les plus remarquables s’est cristallisée dans une forme particulière appelée hadra. La hadra (littéralement : « présence ») est un rituel qui se pratique dans le contexte spirituel des assemblées des confréries religieuses rattachées au soufisme. Elle comporte des invocations, des louanges et des prières chantées, dont la finalité est de parvenir à un certain état d’extase (wajd), considéré comme le fruit d’une union avec la présence divine. Cet art se manifeste aujourd’hui notamment lors des moussem, les anniversaires et les festivités, et spécialement celui du Mouloud, l’anniversaire de la naissance du Prophète Mohammed.
D’une beauté féerique, cette expression est aujourd’hui plein essor grâce la détermination d’une jeune mère de famille charismatique, Rahoum Bekkali, actuelle dépositaire de cet héritage familial. Fille d’un cheikh, elle est en outre diplômée en musique arabo-andalouse (chant et ‘oud), raison pour laquelle elle soigne particulièrement la dimension esthétique de cet art spirituel. C’est dans cette perspective qu’elle transmet régulièrement son héritage à un groupe de jeunes filles de la région de Chefchaouen, auquel elle a donné le nom de Akhawat el-Fane el-Assil, les « Sœurs de l’art traditionnel ».
L’ensemble Akhawat el-Fane el-Assil s’attache à préserver cet ancien héritage du soufisme et des traditions populaires, en y rajoutant une part de créativité et d’originalité. Les paroles des chants sont des poèmes en arabe provenant soit de la tradition familiale des Bekkali, soit du répertoire soufi des chants de sama‘ composés par des maîtres de la tradition classique arabo-andalouse